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ARTCANCRE:Le cinoche des cancres
2 novembre 2007

FRONTIERES

18656488

Réalisé par Xavier Gens en 2007

Avec Karina Testa, Aurelien Wilk, Samuel Le Bihan, Estelle Le febure, Maud Forget et la participation de Yannick Dahan

Alors que l'extrême droite arrive au second tour de l'élection présidentielle, un groupe de jeunes braqueurs débarque dans une auberge en pleine forêt. Celle-ci est située dans une ancienne friche minière et ses tenanciers sont particulièrement sordides...


TRAILER


Xavier Gens cite le "Massacre à la tronçonneuse" de Tobe Hooper comme
son film de référence en matière de climax poisseux, et le moins que
l'on puisse dire, c'est qu'il n'aura pas à rougir de la comparaison.
"Frontière(s)" n'est ni plus ni moins qu'une très grosse claque dans la
gueule, malgré quelques petites erreurs de jeunesse...

Le contexte du film n'est déjà pas propice à la sérénade : Xavier Gens
choisit de planter son action lorsque l'extrême droite décroche une
place au second tour des élections présidentielles, ce qui lui permet,
en tant qu'artiste, de prendre parti, délivrer un message sans que
cela soit au final convenu (c'est même plutôt salutaire). Il dénonce
donc au passage la dérive qu'hélas le pays n'en finit pas de
connaître... But louable ma foi, ce coup de gueule en sous-texte est
donc prétexte à faire connaissance avec une bande de petits truands
pour qui un braquage tourne mal.
Hystérie, loose, déchirements, débâcle et même issue fatale pour l'un
des protagonistes. Le groupe trouve refuge dans une auberge paumée en
rase campagne, située dans une ancienne friche minière peu affriolante
et régal de décor glauquissime... la planque va vite se révéler être un
cauchemar absolu car les hôtes de ceux lieux sont relativement
dégénérés, et bien décidés à bouffer du fuyard à tous les repas...

Le prologue urbain et policier s'avère être l'une des limites du film,
car on sent que xavier gens n'a pas eu les moyens de fouiller
psychologiquement cette présentation des personnages. On fait irruption
dans la débâcle manière immergente grâce aux mouvements de caméra
hypra-rapides et haletants, on ne fait malheureusement qu'effleurer
l'intimité de ces jeunes déchirés, et l'empathie ne se fait pas
vraiment... Lors de l'avant-première à Strasbourg, Xavier reconnaît
lui-même les limites de ces scènes d'exposition, dues à des limites
budgétaires entre autres.
On perçoit ce prologue comme un peu "vite expédié" et parfois presque
un peu limite au niveau de la direction d'acteurs, et du jeu de
certains personnages, mais bon, on se dit que le film de genre c'est
""ça aussi" et puis... dès que le premier groupe de fuyards débarque à
l'auberge, toutes ces petites réserves ne vont pas tarder à être
balayées car on bascule très rapidement dans ce qui est, à mon sens, ni
plus-ni moins qu'un très grand survival.

Choc majeur ce "Frontière(s)", qui imprime la rétine et le cerveau de
manière durable, et fait instantanément passer tous les survivals
récents, même si parfois estimables (Wolfcreek, la colline a des yeux
etc.) pour des remakes de "mon curé chez les nudistes" car en matière
d'ambiance poisseuse et de menace glauque, le film emporte haut-la-main
la palme, tout en évitant finalement la surenchère du gore, ce qui en
soit est une réussite comparable au film de Tobe Hooper qui, malgré sa
réputation gore, est plus éprouvant dans sa suggestion (bande son,
ambiance, décors, lumières) que par la vision des massacres, très
limitée au final. Attention cependant, l'amateur de scènes
estomaquantes vont être servies et de véritables mini-séismes visuels
émaillent le film... On sent vraiment que Xavier Gens est un amoureux
du film de genre, et que l'hommage est beaucoup plus subtil que la
simple représentation d'un catalogue de scènes-choc recrachées les unes
derrière les autres comme beaucoup de films l'ont fait auparavant. Le
travail sur la bande-son ainsi que la photographie très terreuse sont
vraiment une réussite et participent largement à ce choc visuel et
physique... Le parti-pris de filmer toujours au plus prêt des visages
contribue également à nous faire ressentir le film comme un long
uppercut, nous vivons le cauchemar en direct, nous sommes dans la
friche...
Physique, c'est le terme qui convient à mon sens le mieux pour décrire
ce que l'on ressent tout au long du film, et qui va aller crescendo. À
ce niveau, Xavier Gens fait déjà preuve d'une étonnante maîtrise, d'une
grande maturité dans ses choix, ce qui laisse à penser que l'on tient
un futur incontournable du film de genre !

Très rapidement le personnage de la jeune fuyarde enceinte va devenir
le vrai sujet du film, et plus particulièrement ses relations avec la
plus jeune des "filles" du "bon doktor", tout l'enjeu du film étant au
final de révéler que la nature et l'humanité sont toujours
sous-jacentes et victorieuses, le but de ces deux femmes étant, de
manière viscérale, de sauver leurs vies pour sauver la vie de leurs
descendance.
L'une va survivre par tous les moyens, faire preuve d'une sauvagerie
totale qu'elle ira chercher loin en elle-même, mue par l'instinct
primaire de la femme qui porte un enfant. L'autre, jeune femme a qui on
a tout pris et qui est mère d'enfants dégénérés, choisira de défendre
la fille-mère et de rester auprès de ses enfants. Le choix de ne faire
des enfants que des apparitions fantomatiques est clairement assumé par
le réalisateur, qui a préféré couper au montage des scènes trop
didactiques qui ne le satisfaisaient pas. Notre imaginaire ainsi que
nos souvenirs mi-tchernobyl mi-cinéphiles sont suffisamment puissants
pour créer une représentation de cette horreur enfantine, et la
pression ainsi engendrée n'en est que décuplée.

Film humaniste avant tout pour qui acceptera de prendre de la hauteur
une fois passé le choc, "Frontière(s) nous dépeint un monde finissant,
gangrené, délabré, mais qui porte toujours en son sein la pureté de
l'enfantement, la promesse d'un avenir différent. À ce titre les deux
personnages féminins sont remarquablement imaginés, et incarnés, et
font ressortir un message formidable, celui de l'idéalisme, idéalisme
renforcé par les deux personnages du père nazi ainsi que du fils que
joue Samuel Le Bihan, qui sont tous deux surjoués, puissants,
caricaturaux à l'extrême et assumés dans ce sens, pari osé et réussi
car cette surenchère ne fait que mettre en lumière le grotesque social
ambiant, les monstres que l'humanité a pu engendrer et contre lesquels
nous devons lutter pour offrir à des enfants la possibilité d'un
ailleurs, d'un mieux...
C'est toute la force du film de Xavier Gens, un survival à la
française, un film choc de sensibilité européenne, avec tout ce que
cela peut avoir de connotation positive et profondément humain, tout
comme l'était également "Calvaire" avant lui et c'est un hasard (Xavier
Gens
n'a vu Calvaire qu'après avoir réalisé son propre film).

Film à voir absolument, film dur de dur, choc, humain, imparfait et
prometteur, Frontière(s) vous attend et s'apprête à vous mettre le nez
dans la porcherie, l'âme encore plus face à la réalité d'une société
malade et qui engendre chaque jour davantage plus de monstres et de
tristesse.

-p_ko-

LE PREMIER ATRICLE SUR FRONTIERES: ICI

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Commentaires
Z
J'poste ce comm juste pour dire que je suis allé voir il y a peu Hitman du grand Xav et y a du talent derrière la caméra. J'vous fais une chronique dans pas longtemps (et une critique de Die Hard 4 qu'un certain kit attend depuis septembre -__-)<br /> <br /> -Ze Ring-
L
ainsi ne parla plus zarathoustra !<br /> <br /> bonne année a toi crevette !
C
Bonne année a tous!
K
Et merci beaucoup...<br /> <br /> Patch: Non je ne tourne pas mais ma vie privee me prends enormement de temps... car l'ami kit se prepare a se marier... he oui.. voila mine de rien je glisse cette nouvelle... cela dit j'espere pouvoir reecrire bientot, trouver le temps et la motivation de faire qelques critiques de tous les merveilles de ciné que j'ai vu recemment...<br /> <br /> Ce soir pour moi et ma cherie c'est premier episode de notre marathon ROME dont on vient d'acquerir l'integrale, je vous en recause bientot<br /> <br /> A plus, et bonne annee<br /> <br /> kit
P
Un petit mot pour te souhaiter une bonne année, ami Kit, ainsi qu'à toute l'équipe d'Artcancre, et une bonne chiée de films comme on aime.<br /> Tu te fais rare en ce moment... Tu nous tournerais pas un autre film, des fois?...<br /> Hélas pas pu voir "Frontières" - la damned malédiction des cinoches de province! - mais en revanche il passe "Hitman" de par chez moi: je vais aller y jeter un oeil et je t'en recause éventuellement...
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